Berlioz Béatrice et Bénédict Glyndebourne DOustrac Appleby Sly Karthaüser

Etrange de transposer la Sicile pittoresque et bariolées où Shakespeare place l’action de Beaucoup de bruit pour rien en cette grisaille de décor, avec le lourd symbole de ces boites que les futurs mariés malgré eux refusent d’ouvrir, symbole probable des c arcans de la famille et de la société. Plus étrange encore qu’Agathe Mélinand n’ait pas engouffré sa plume dans le livret imparfait de Berlioz pour le « griffer moderne », alors même que ce à quoi le compositeur a réduit l’intrigue – le seul face à face de Béatrice avec son « Monsieur Dédain » - l’y invitait d’évidence. Une fois le gris accepté, visuellement et spirituellement alors qu’il est en contraste complet avec la musique qui y résonne, on suit pourtant avec plaisir la fine direction d’acteur de Laurent Pelly versant en une seconde du loufoque à l’affrontement des caractères, d’autant que Stéphanie dOustrac réitérant sa flamboyante Béatrice de Bruxelles, y est idéale, mordante, vipérine, cachant derrière ses saillies un cœur qu’elle sait prêt à céder. Son Bénédict au français appuyé n’a pas la même vivacité, dépareillant un couple où tout doit fuser, les mots comme les notes. Magique Héro de Sophie Karthäuser qui au Nocturne de la fin du I fait se pâmer avec elle l’Ursule de Katarina Bradic, irrésistible Somarone selon Lionel Lhôte, orchestre et chœurs vivement enlevés par l’excellent Antonello Manacorda, on écoute avec plaisir, même si l’œil rechigne à se coltiner deux heures de gris. Dommage, c’était la première captation vidéo de la comédie de Berlioz… (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)