Le piano de Brahms, cette symphonie de confidences et d’épopées, a de la chance au disque ces derniers temps : hier Gabriel Carcano enflammait la Troisième Sonate, aujourd’hui Fabian Müller dont j’avais tant aimé le premier opus lui consacre son second album solo. Programme de crépuscule : les quatre Ballades jouées sombre, intense, dramatique, l’automne ténébreux des Klavierstücke op. 76, les Intermezzi op. 117 et pour ceux qui iront tout au bout de ce disque nocturne, « Guten Abend, gute Nacht », ultimes pianissimos qu’aucune plage ne vous indique. Les affinités électives du jeune pianiste allemand avec l’univers de Brahms ne sont plus un secret depuis qu’il aura donné un magistral op. 118 voici deux ans au Klavier Festival-Ruhr. Ses Ballades épiques et amères sont-elles d’un jeune-homme ? La concentration du toucher, le creusement des phrasés, quelque chose de désolé rappellent la rumeur que Claudio Arrau y distillait, et ce jusque dans l’embelli fugitive de l’éclaircie qui vient dorer l’aigu du clavier dans la Quatrième. Elles donnent la main à un opus 76 envoutant à force de poésie, aux horizons fuligineux : écoutez seulement la tempête nocturne qui ouvre le premier Capriccio puis le chant éolien qui suit. La profusion de l’harmonie s’épanouit dans un Steinway magnifique, clavier chantant, médium pourpre, un automne de piano où viendront se suspendre les méditations des Intermezzi, murmurés. Fabian Müller y fait passer le souvenir de Schumann, qui parait dans le second. C’est d’un pianiste poète qui confirme ici son art dans un répertoire particulièrement périlleux. Il peut regarder les plus grands dans les yeux, il est chez lui chez Brahms, sculptant le temps, phrasant les secrets d’un univers qui ne s’offre pas si facilement, aidé par une prise de son élégante qui relève encore la profondeur de son propos. Album immanquable. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé) Fabian Müller was given Brahms's complete piano works on CD as a child, and he would sit in the back of his parents' car on the way to vacation, enraptured by the music of the Hamburg composer. Nothing has changed in his attitude since then. Fabian Müller has embarked on a promising career which has already been full of thrills and continues to progress very favourably. In 2017 he was the first German pianist in this millennium to win a second prize at the ARD Music Competition as well as being awarded both the Audience and Busch prizes. He had attracted international attention in 2013 as a prizewinner at the Ferrucio Busoni Competition. He gave his debut at New York's Carnegie Hall in the spring of 2018, and at the Elbphilharmonie in Hamburg in September that year. The Bonn-born pianist demonstrates Brahms's calm, intro-verted pianistic approach in his recordings of the Ballades op. 10, the Piano Pieces op. 76 and the Intermezzi op. 117. This is an unusual choice for such a young artist: Müller's playing style eschews sensational pianistic virtuosity, instead evincing heartfelt musicality, especially in the soft tones. In “piano expert” Stefan Knüpfer, who is known from the film Pianomania, he has found the perfect technical partner, who knew exactly how to react to his ideas and wishes. The result is a sound that is almost inimitable. On his debut album for Berlin Classics he can be heard inviting listeners to totally immerse themselves in the music. “This is music that I wish to hear when I am old and perhaps ailing, because despite their sadness they emit such warmth and comfort, characteristics that I have found in no other composer.”
|