Orlando di Lasso (ou Roland de Lassus en français) a écrit plus d'une centaine de Magnificat (Hymnes à la Vierge). L’Église catholique a cherché toujours à toucher l’âme de ses fidèles par la musique, surtout pendant cette période de Contre-Réforme. Ce qui est intéressant ici, c’est la confrontation entre des chansons profanes de l’époque (Claudin de Sermisy, Philippe Verdelot, Josquin des Prez, etc.) et les pièces de Lassus qui réutilisent et insèrent ces matériaux en les modifiant. Chaque chanson est enregistrée en prélude du Magnificat correspondant. Les voix des Singphoniker (un contre-ténor, trois ténors et deux basses), captées dans une église de Munich, sont exemplaires de clarté et d’une parfaite homogénéité. Bien sûr, une trop grande homogénéité peut apporter aussi une certaine monotonie. On écoutera ce disque dans un but de recueillement. Les Singphoniker avaient déjà enregistré un précédent disque d’Hymnes de Lassus en 2013. Leur répertoire (cantonné pourtant à 6 voix masculines) semble, pour notre plus grand bonheur, s’enrichir sans fin, de la Renaissance au Contemporain. Toujours dans l’excellence ! Le compositeur franco-flamand Orlando (Roland) de Lassus a composé une centaine de Magnificat. Ces pages sont des séquences mariales, en hommage à la Vierge Marie. Elles sont basées sur des chansons ou des madrigaux. On y retrouve par exemple les noms de Cipriano de Rore, De Josquin, de Claudin de Sermisy. Extrêmement virtuoses, elles alternent par fragments homophonie et polyphonie dans un souci constant de jeu et d'articulation. Chaque séquence donne l'occasion d'entendre après la source (une mélodie simplement arrangée (Da le belle contrade de Rore) ou bien d'une structure déjà sophistiquée (le praeter rerum seriem de Josquin), le formidable traitement polyphonique qu'en fait De Lassus. Le très bref "Il est jour" à 4 de Sermisy est ainsi totalement métamorphosé. Le beau madrigal "Ultimi miei sospiri" de Philippe Verdelot est aussi ainsi transformé et son sens quasiment détourné. L'humaine plainte, résignée, déchirante, est devenue par la magie des coutures vocales, prière fervente et laudative. Dominé par le contre-ténor Johannes Euler, au timbre blanc cristallin, et constitué de deux ténors et de deux basses, l'ensemble Die Singphoniker que l'on connaissait dans un répertoire plutôt varié (Du grégorien à Simon and Garfunkel), donne une lecture à la fois rigoureuse, maitrisée et profondément spirituelle de ces pages (Il a signé chez le même label un recueil de Madrigaux de Lassus et un album similaire sur le thème des Hymnes). (Jérôme Angouillant) After our successful CD featuring hymns by Orlando di Lasso, we are now releasing a new CD with the Singphoniker entitled Magnificat. Here, however, the polyphonic segments of the selected Magnificat compositions are based not on monophonic models but on preexistent compositions. Accordingly, here we have to do with parody works in which a procedure widespread in Masses is applied to the Magnificat. Forty of Lasso’s 101 Magnificat compositions are to be assigned to this type. These imitation Magnificats in no way involve a simple retextualization of preexistent works. At the beginning Lasso mostly rather precisely draws on his particular model, but then he quickly departs from it. In the Magnificat on Rore’s Da le belle contrade the beginning corresponds to the original, but soon thereafter it departs from it; the textual passage »in Deo salutari« is completely freely set. This procedure thus is somewhat similar to collage technique: the possibilities range from the use of whole passages to the relayering of blocks, paraphrasing, quotations of individual voices, free continuation, and so on. The result may safely be termed a new creation on the basis of a preexistent work. »The sound developed by the Singphoniker may be described as cathedral and no less directly immediate.
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