 Audacieux et intéressant projet que celui mis en œuvre dans ces 2 cd. Et qui satisfait simultanément une multitude d'exigences : musicales, musicologiques, historiques, biographiques, littéraires et même pédagogiques ! Froberger fut sans doute le compositeur le plus cosmopolite de l’époque baroque. Précurseur de ce qu'on allait appeler plus tard les « goûts réunis », inlassable voyageur, il se rendit dans la plupart des hauts lieux de création musicale de son temps. Élève de Frescobaldi à Rome, il rencontra Couperin à Paris, séjourna à Bruxelles, devint, notamment, l'ami de Weckmann, et réalisa à travers une œuvre presque uniquement dédiée à l’orgue et au clavecin, la synthèse des grandes traditions européennes. Il marqua durablement l'histoire de la musique. Sa réputation internationale était liée aux fonctions qu'il occupait auprès des puissants, ainsi qu’aux manuscrits, aux copies,aux voyages, car il ne se soucia jamais de faire imprimer son œuvre de son vivant. Sa musique qui relève en partie du stylus phantasticus cher au savant jésuite Anathasius Kircher - « méthode la moins contrainte de composition » illustrant « l'ingéniosité des conclusions harmoniques et de l’assemblage fugué »— est aussi introspective, intime, sensible. Inventeur de la « musique à programme », il raconte, dans certaines de ses œuvres, ses aventures personnelles, livre ses états d'âme. Ainsi, plusieurs des pièces enregistrées ici, sont pourvues de commentaires tels que « à Londres pour passer la mélancholi : la quelle se joüe lentement avec discretion » ou « en passant le Rhin dans une barque en grande péril ». Magdalena Hasibeder fait alterner des pièces judicieusement choisies de Froberger avec des œuvres de compositeurs contemporains qu'il rencontra durant ses voyages, qu'il fréquenta, dont il s'inspira et qu'il inspira. Le panorama prodigieusement informé qu'elle nous livre, révèle au passage des compositeurs peu connus (Poglietti, Ebner, Steigleder…). À des compositions obéissant à des règles de construction strictes et codées, hiératiques, sont associées des formes plus libres, voire profanes (caprices, canzone, danses…) et même, dans le disque d'orgue, des facéties musicales (évoquant les poules, les coqs, le coucou - thématique assez répandue dans la musique baroque). Bref, le programme proposé concilie la magie du kaléidoscope à la précision du mécanisme d'horlogerie, car tout y fait sens et rien n'y est laissé au hasard. Il invite à des confrontations, à des comparaisons à de multiples niveaux. Nous sommes en présence d'un miroir sonore, où tout vient se réfracter de façon habile, subtile et ingénieuse dans la figure centrale mais ô combien mouvante de Froberger, qui à travers la dispersion géographique de ses voyages construit sa synthèse des formes et des styles. On appréciera tout particulièrement les qualités d'articulation et l’allant de l'interprète (voir p.e. la Toccata pour clavecin de Weckmann), la lisibilité, le caractère incisif et l'éclat franc de son jeu, la profondeur qu'elle donne à la rhétorique déploratoire des « Tombeaux », (Froberger, Couperin), sa façon d'exposer (dans tous les sens de ce verbe) les pièces dans lesquelles Froberger se raconte (Plainte).Un enregistrement précieux, bien pensé, remarquable à tous égards. (Bertrand Abraham)  Johann Jacob Froberger est l’un des musiciens à la fois les plus illustres et les plus mystérieux du XVIIe siècle. Né en 1616 à Stuttgart, il est mort en 1667 au service de la duchesse Sybille de Wurtemberg, devenue veuve, qui appartenait à une branche de la lignée des comtes de Montbéliard. Tout ce que son époque comportait d’essentiel dans les formes, les concepts de mouvements et les idéaux d’expression se reflète dans son œuvre. Si justement, de nos jours, Johann Jacob Froberger fascine, c’est que ce qui fait l’Europe est remis en cause. Au cours de ses multiples voyages et grâce à ses bons contacts, il lui fut donné de découvrir autant de points communs que de particularités locales et nationales. Froberger jouait sur tous les instruments à clavier de son époque ; Magdalena Hasibeder fait revivre les étapes de ses périples sur le plus ancien orgue jouable de Vienne (Johann Wöckherl 1642-1643) et sur deux clavecins du musée du Land de Wurtemberg à Stuttgart.  Johann Jacob Froberger numbers among the most well- known and yet most enigmatic musicians of the seventeenth century. He was born in Stuttgart in 1616 and died in 1667 in the service of the widowed Duchess Sybilla from the Mömpelgard collateral line of the House of Württemberg. His oeuvre displays all the important forms, compositional concepts, and expressive ideals of his epoch. He exerts a special fascination today, above all since the concept of “Europe” is once again being put to the test. There are just as many unifying factors here as there are local and national particularities, things that Froberger was able to discover on his many journeys and through his network of contacts. His works were not limited to a specific – from today’s view – authentic instrument: he made use of all the keyboard instruments common at that time. Magdalena Hasibeder plays Vienna’s oldest playable organ, it was built in 1642/43 by Johann Wöckherl and erected in the choir of the Franziskanerkirche. The harpsichord is a French two-manual instrument built ca. 1680 and attributed to Claude Labréche. Magdalena Hasibeder was born in Linz, Austria, where she received her musical training at the Music High School and at the Anton Bruckner Private University for Music, Drama, and Dance. Further studies in organ, harpsichord, early music, and instrumental pedagogy led her to the Vienna University of Music and the Schola Cantorum Basiliensis. Among her teachers were Wolfgang Glüxam, Andrea Marcon, Michael Radulescu, Augusta Campagne, and Rudolf Lutz. Since 1997 Magdalena Hasibeder has appeared in organ and harpsichord concerts at festivals and in concert series throughout Europe. From the very beginning of her career, she has been greatly involved in ensemble activity. As a sought-after continuo player and soloist, she has performed in numerous renowned ensembles, including La Cetra Barockorchester, the Venice Baroque Orchestra, the Bruckner Orchester Linz, Il Concerto Viennese, the Bach Consort Wien, and Concerto Stella Matutina.. She was a prizewinner at several international organ competitions, including the Paul Hofhaimer Competition Innsbruck, the Organ Competition in Herford, Germany, and the Georg Muffat Competition in Schlägl, Austria.

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