Il fallait bien oser un jour dédier tout un album au créateur du piano et à sa « créature » : Bartolomeo Cristofori (1655-1732). Objet, inventer un instrument à clavier qui puisse moduler la dynamique, produire des contrastes entre piano et forte. On est à Florence, circa 1690. L’instrument mate, sans le brio du clavecin, déconcerte. C’est pourtant lui, à force de progrès techniques, qui aura gain de cause historiquement, alpha du piano moderne à venir. Et il faut bien avouer qu’en entendant Linda Nicholson toucher pourtant avec tant d’art la reconstitution d’un instrument de Ferrini, l’un des disciples de Cristofori, mené de main de maître par Denzil Wraight, une déconvenue se fait jour. Est-ce le répertoire ? Partiellement oui, car Platti, Alberti, Giustini, sinon Paradisi, sont des petites mains musicales, leurs sonates bavardes, pleines de formules d’école endorment. Du moins vont-elles comme un gant aux couleurs grises du nouveau clavier. Mais lorsque la Deuxième Suite de Haendel parait, le son court, sans projection, sans éclat, terne malgré les subtilités de l’interprète, fait immédiatement regretter le clavecin, pis encore pour Scarlatti où Soler. L’album sera utile aux historiographes, le document sonore précieux pour comprendre les débuts d’une nouvelle facture, mais vite on retourne aux magnifiques clavecins. Discovering the Piano, Lodovico Giustini, Sonate n°1, Pietro Domenico Paradisi, Sonate n°10, Geroge Friedrich Haëndel, Suite n°2, Giovanni Benedetto Platti, Sonate op. 1 n°4, Domenico Scarlatti, Sonates K. 87, 118, 119, 547, Domenico Alberti, Sonate op. 1 n°5, Antonio Soler, deux Sonates en ut mineur, Linda Nicholson, un CD Passacaille 1024. (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)
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