L’année passée Yoko Kawakubo et ses deux amis de l’ensemble Les Timbres offraient une version haute en couleurs, au jeu dru, de ces Pièces de clavecin en concert. J’avais adoré leurs phrasés essentiellement conformés à la danse. Et voici qu’une nouvelle proposition signée par Il Gardellino parait, tout aussi réussie, évoluant dans la même lumière. Cette fois c’est autour du violon de Ryo Terakado que se groupent non pas deux instrumentistes comme chez Les Timbres (viole de gambe, clavecin), mais trois : la flûte ailée de Jan de Winne donne aux pas dansés une couleur plus savoureuse, un élan ardent, et le discours se dore littéralement d’un luxe de nuances, d’une profondeur des phrasés qui invitent dans ses pièces pour la chambre le monde de l’opéra. C’est décidément bien vu, artistement ouvragé, enlevé avec esprit, dansé partout et alignant des images vivantes comme tirées d’un spectacle. Rameau tel qu’en lui-même, savoureux et inventif. Disque irrésistible (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé) A l'instar des Corelli, Couperin ou Mondonville, Rameau reprenant ses pièces pour clavecin seul, à voulu dans ces transcriptions "en concerts" créer à partir d'un petit ensemble de chambre un effet chambriste, concertant, en tout cas, plus orchestral. Le flutiste Jan de Winne, pour en rajouter, n'hésite pas à modifier l'arrangement de chaque pièce de façon à varier les timbres et les couleurs, en doublant notamment certains instruments. Comme l'indique le compositeur dans ses "avis aux concertants" : "...Il faut non seulement que les trois instruments se confondent entre eux mais encore que les concertants s'entendent les uns les autres que surtout le violon et la viole se prêtent au clavecin en distinguant ce qui n'est qu'accompagnement de ce qui fait partie du sujet … Tous les sons continus doivent être filés plutôt en adoucissant qu'en forçant, les sons coupés doivent l'être extrêmement avec douceur, et ceux qui se succèdent sans interrution doivent être moelleux, c'est en saisissant bien d'ailleurs l'esprit de chaque pièce que le tout s'observe à propos". Les quatre musiciens d'Il Gardinello respectent à la lettre la dialectique ramiste. En adoptant des tempi modérés (au risque de l'apesantissement et de l'uniformité: les airs gracieux (La Livri et La Boucon), ils assurent ainsi une vraie lisibilité aux échanges intrumentaux. Comme on nettoierait un vernis sale sur un tableau, ils retrouvent les coloris originaux et l'harmonie d'ensemble. Merveilleuse Forqueray et Cupis d'une ineffable tendresse : des modèles d'équilibre. Prise de son superlative qui donne au clavecin un rôle enfin juste et prédominant. (Jérôme Angouillant)
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