Les Impromptus de Schubert furent réinventés par Artur Schnabel qui les tira de l’éclairage affadi des abat-jours des salons pour leur donner le ton de ce qu’ils sont effectivement : des pièces de style libre, d’une poésie impertinente, où le piano est un monde en soi, et qui se souvient des inventions poétiques tentées par Dussek, Vorisek et plus encore Tomasek avec ses Eglogues. Puis Edwin Fischer vint, les enflammant littéralement. Amir Katz ne peut dissimuler qu’il connait le disque des Impromptus d’Ewin Fischer sur le bout de ses dix doigts, l’Allegro scherzando qui conclut le cycle complet, envisagé comme un ensemble de huit scènes dramatiques, joué comme un furiant, avec des accents diaboliques, en rythmes cabrés, mains droite persiffleuse, main gauche tonnante, n’a pas d’équivalent dans la discographie sinon chez Edwin Fischer. Ce n’est pourtant en rien une copie, mais la même source qui inspire à travers les décennies ces deux pianistes accomplis doublés d’artistes visionnaires les rapproche singulièrement. Autant dire qu’à l’image de cet Impromptu fantasque, les deux cahiers sont marqués au sceau d’un caractère puissant, et par un artiste qui a les moyens de ses visions, quelle main gauche, quel clavier plein et fusant, quelle arc en ciel de couleurs et quel art de la dramaturgie qui sait que le rubato, les suspension, la polyphonie elle-même, forment un langage dont la syntaxe rayonne ici avec une ardeur folle, écoutez l’Allegro du premier cahier, le Thème et variations du second, écoutez surtout l’ultime Impromptu, il vous stupéfiera. Lorsque l’on sait qu’Amir Katz joue toutes les sonates de Schubert, je me demande bien ce qu’attends Orfeo… (Discophilia - Artalinna.com) (Jean-Charles Hoffelé)
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