Smetana Œuvres pour piano Ohlsson - CDA68062 - Hyperion - Classique - Nos labels

Ce sont les gemmes oubliées du piano romantique, d’ailleurs toute l’œuvre de clavier de Bedrich Smetana, qui en qualité et en volume n’est pas si loin de celle de Schumann, reste peu courue en dehors de Tchéquie, et guère défendue par des pianistes qui ne soient pas nés où n’aient été formés au bord de la Moldau, l’occasion de saluer d’un grand coup de chapeau le plein album que consacre aujourd’hui Garrick Ohlsson aux deux cahiers des Danses tchèques. Pour un pianiste si cultivé, et un virtuose aussi consommé ces musiques difficiles ne devraient présenter aucune aspérités. Si Garrick Ohlsson les joue avec beaucoup de panache, un grand sens des atmosphères, et ce son de grand piano qui fit sa fortune chez Chopin, avec les années son clavier s’est quelques peu épaissi, défaut qui le fait buter dans le redoutable Furiant qui ouvre le second cahier. Là où Rudolf Firkusny envolait littéralement son piano (plus encore dans le remake pour Vox qu’en ses premiers essais chez Columbia ou Capitol), Garrick Ohlsson décompose le mouvement, phrase tout mais ne danse guère. C’est d’ailleurs l’élan qui lui manquera tout du long de ce disque par ailleurs admirable dans sa science de la composition, par ses accents lumineux, par cette façon de chanter dans les polyphonies d’un piano qui hésite souvent entre Liszt et Schumann, tout cela faisant largement assez d’invites pour venir y voir. Il ajoute en postule l’étude d’arpèges d’Au bord de la mer, page sage en comparaisons de l’invention et du caractère si marqué des Danses. Je l’aurais plutôt attendu dans le tableau génial de Macbeth et les sorcières où sa grande virtuosité aurait fait flores (Discophilia - Artalinna.com). (Jean-Charles Hoffelé)

De Smetana, on connaît que peu d'œuvres en dehors de la République tchèque : le premier quatuor, un cycle de poèmes symphoniques et "La Fiancée Vendue" essentiellement. Pourtant à l'écoute de ce disque on se demande pourquoi les pianistes ne jouent pas davantage les "Danses tchèques". Les quelques extraits gravés par l'immense Moravec méritent de faire partie de toute discothèque mais le cycle intégral nous frappe par la variété de l'inspiration de Smetana à la fin de sa vie. Le compositeur a trouvé dans les mélodies paysannes de quoi renouveler son écriture pour le piano. Le premier cahier de quatre Polkas évoque encore Schumann et Chopin. Smetana a d'ailleurs affirmé son ambition de transcender la Polka, comme Chopin l'a fait pour la Mazurka. Mais les dix pièces suivantes s'en éloignent pour coller davantage aux tournures de la musique folklorique. Certaines irrégularités rythmiques (dans "L'Ours" par exemple) annoncent les pages de Janacek ou Bartok. Garrick Ohlsson sait varier les couleurs et les éclairages, d'une Etude virtuose (3e Polka) à une danse endiablée (Skocna finale) en passant par des chansons populaires faussement naïves. On appréciera également le contenu du livret d'accompagnement. (Thomas Herreng)